top of page

LA GEOCHIMIE

Par JJ Chevallier sur un canevas de textes de différentes origines :

Wikipédia,

Dr Chabou Moulley Charaf Université Ferhat Abbas,

Magali Sautier EMSE Mines St Etienne,

David Weir, R.D. Shanon, University of Colorado, Université d'Ottawa.

logo FB share.png

Mikhaïl Vassilievitch Lomonossov, 1711-1765.

Mikhaïl Vassilievitch Lomonossov.jpg

La géochimie applique les outils et concepts de la chimie à l'étude de la Terre et plus généralement des planètes. Des échantillons protoplanétaires sont accessibles à l'investigation c'est l'étude des météorites où la présence des éléments chimiques sont déterminés par des méthodes indirectes, ce qui permet à cette science d'étudier l'abondance relative et absolue de ces éléments, leur distribution et leurs migrations lors de la différenciation planétaire. Ces études permettent in fine de chercher des lois générales du comportement de la matière à l'échelle planétaire, ce qui lie cette discipline à la cosmochimie dans la mesure où elle s'intéresse aux processus de formation planétaires et intraplanétaires. En ce qui concerne la Terre, cette discipline a pour objectif la connaissance des cycles par lesquels la plupart des éléments chimiques sont conduits alternativement en surface et en profondeur au sein de la planète. S'agissant du sédiment, la géochimie étudie les phénomènes chimiques qui se déroulent de l'interface eau-sédiment à la profondeur du sédiment lui-même.

UN PEU D'HISTOIRE . . . 

C'est Mikhaïl Vassilievitch Lomonossov "Михаи́л Васи́льевич Ломоно́сов", 1711-1765, un chimiste et physicien russe qui est le père de cette science, il étudiait les gisements de minerais au XVIIe siècle. Quelques années plus tard, d'autres chimistes, physiciens et minéralogistes, Martin Heinrich Klaproth, 1743-1817, chimiste, minéralogiste et apothicaire, allemand, Antoine Laurent de Lavoisier,1743-1794, chimiste français père de la chimie moderne, Claude-Louis Berthollet, 1748-1822, chimiste français ou Antoine François de Fourcroy,1755-1809, chimiste français député à la Convention Nationale, fondent les bases de la chimie minérale, la géochimie une des nombreuses disciplines de la géologie.

Le mot a été utilisé la première fois au XIXe siècle,1838, par Christian Friedrich Schönbein, né le 18 octobre 1799 à Metzingen, Duché de Wurtemberg et mort le 29 août 1868 à Sauersberg, près de Baden-Baden, au pays de Bade qui était un chimiste allemand, naturalisé suisse dans le canton de Bâle-Ville. Ses recherches approfondies ont contribué à une meilleure compréhension du rôle joué par l’oxygène, plus précisément la molécule d’ozone, ainsi que des processus liés à sa réactivité. Il avait le premier mis en exergue l’utilité de l’étude des propriétés chimiques des constituants de notre planète. Cette science est donc relativement récente.

C’est en 1908 que la géochimie moderne prend son essor avec la publication de « The data of Geochemistry » de Frank Wigglesworth Clarke (1847-1931), minéralogiste et chimiste américain, un ouvrage de plus de 750 pages. ( 2e édition 1911, - téléchargeable en anglais ICI).


En 1924 et 1926 paraissent deux ouvrages russes suite aux travaux de recherche de Vladimir Ivanovich Vernadsky (1863-1945) et Aleksandr Evgenievich Fersman (1883-1945), le premier "Геохимия" (Geokhimiya) Géochimie et le second "Биосфера" (Biosfera) Biosphère. De 1934 à 1939, Fresman publie 4 volumes. L’ensemble des travaux rédigés russes n’auront pas une forte audience internationale.

 

C’est le chimiste norvégien Victor Moritz Goldschmidt, né le 27 janvier 1888 à Zurich, mort le 20 mars 1947 à Oslo, que l’on considère comme le père de la géochimie moderne avec Vernadsky et Willesworth. Ses travaux lui permettent d’établir une classification géochimique des éléments, classification de Goldschmidt. Les premiers pas de la géochimie telle qu'on la connaît sont rattachés à une série de publications de Goldschmidt en 1926, sous le titre Lois de répartition géochimique des éléments ( Geochemische Verteilungsgesetze der Elemente ). La géochimie est alors la science décrivant la distribution des éléments chimiques dans la nature. Cette approche a non seulement profondément dynamisé la minéralogie, mais également l'ensemble de la chimie théorique et de la cristallographie. Les travaux de Goldschmidt sur l'atome et le rayon ionique ont eu un fort impact sur cette dernière discipline ; de là ont émergé les notions de liaison covalente, ionique, et de rayon de Van der Waals.

Goldschmidt s'est toujours montré très intéressé par les applications techniques de ses travaux scientifiques. Ainsi lui doit-on l'usage de l'olivine dans l'industrie.


Le Glossary of Geology and Related Sciences, publié en 1960, définit la géochimie comme « la science qui traite de l'abondance absolue et relative des éléments et des isotopes sur la Terre entière, qui traite également de leur distribution et de leurs migrations, en vue d'aboutir à des lois générales du comportement de la matière à l'échelle planétaire ». Mais c’est à partir des années 1950, avec le développement de nouvelles techniques d’analyse, permettant notamment de mesurer des concentrations élémentaires ou des rapports isotopiques, que cette science a pris son essor. Aujourd'hui, la géochimie est la source de multiples découvertes et avancées de premier ordre, comme la datation d'objets géologiques.

Martin Heinrich Klaproth, 1743-1817.
Antoine François de Fourcroy,1755-1809
Antoine Laurent de Lavoisier,1743-1794.
Christian Friedrich Schönbein 1799-1868.
Claude-Louis Berthollet, 1748-1822.
Vladimir Ivanovich Vernadsky 1863-1945.
Evgenievich Fersman 1883-1945.
Frank Wigglesworth Clarke 1847-1931.
Victor Moritz Goldschmidt 1888-1947.

Vous pouvez télécharger ici un PDF à propos de :


Contribution de la naissance de la chimie minérale au développement de la minéralogie et de la pétrographie à la fin du XVIIIe siècle.
par Jean LAFAILLE
COMITÉ FRANÇAIS D'HISTOIRE DE LA GÉOLOGIE (COFRHIGEO)
(séance du 7 décembre 1978)

Couverture PDF.jpg

P D F 
CLIC

LES CLASSIFICATIONS GEOCHIMIQUES DES ÉLÉMENTS

La classification géochimique des éléments, aussi appelée classification Goldschmidt résulte des travaux, dans les années 1920, du chimiste Victor Goldschmidt, elle a été publiée en 1954, elle est fondée sur les proportions des éléments chimiques de la Terre. Elle met en évidence une relation simple entre la répartition des grandes familles de ces éléments chimiques et la structure interne de la Terre. Elle explique notamment la proportion des terres rares[1] dans les différentes phases minéralogiques lors de la cristallogenèse à partir d'un magma.

C’est la comparaison des analyses de la composition élémentaire des phases minéralogiques, des météorites et des produits de fusion des minerais sulfurés, qui  a orienté Goldschmidt à différencier quatre classes d'éléments selon leur activité géochimique en fonction de leurs propriétés ioniques (rayon atomique et ionique, valence, électronégativité, potentiel d'ionisation, propriétés qui sont liés à leur position dans le tableau périodique des éléments de Mendeleïev) et de leurs positions réciproques dans les structures cristallines[2] :

 

  • lithophiles (pour Goldschmidt ce mot précisait l’affinité pour les silicates, puisque le grec λιθος lithos « roche » s’applique essentiellement aux silicates et aluminosilicates), minéraux ayant une relation prépondérante avec l'oxygène et se retrouvent donc parmi les aluminates et les silicates. Les terres rares qui appartiennent aux éléments lithophiles, sont des éléments incompatibles, ils se concentrent dans les liquides silicatés résiduels après cristallisation fractionnée d'un magma ;

  • chalcophiles, qui ont une relation remarquable avec le soufre, pour Goldschmidt, chalcophile signifiait « qui a de l'affinité pour le soufre », remarquons toute fois que χαλκος signifie cuivre en grec ancien ;

  • sidérophiles, qui ont une relation remarquable avec le fer — c'est le sens exact du grec ancien σιδηροφιλος ;

  • atmophiles, qui ont une prépondérance pour les phases fluides — ἀτμος signifie vapeur en grec ancien.

 

Cette classification n'est pas standardisée, et d’autres études répartiront les éléments différemment. Un élément situé à la limite de deux classes peut avoir, selon les cas, un comportement le reliant tantôt à l'une ou l'autre, de ce fait :

 

  • le fer est curieusement par nature à la fois chalcophile, lithophile et sidérophile, ce qui explique son abondance dans la croûte terrestre. 

  • le phosphore est habituellement vu comme lithophile, mais est sidérophile en l'absence d'oxygène.

  • le carbone est habituellement considéré comme atmophile car ses formes solides (charbon, carbonates) sont issues du dioxyde de carbone atmosphérique, il est sidérophile en l'absence d'oxygène.

  • le germanium et l'étain, principalement chalcophiles, ont également des apparences sidérophiles ou même lithophiles.

L'état d'oxydation peut faire varier la situation d'un élément, comme le chrome : Cr3+ qui est chalcophile, mais Cr6+ lui est lithophile[3].

Classification géochimique de Goldschmidt tableau des éléments.

STRUCTURES INTERNES DE LA TERRE

La distinction de classes est liée au modèle de la différenciation géochimique de la planète en un noyau dense formé d'alliages de fer et nickel, entouré d'une enveloppe de sulfure dans la mésosphère, puis de la couche silicate (manteau supérieur et lithosphère), de l'hydrosphère et de l'atmosphère[5] :

·         les atmophiles (H, C, N, O, F, gaz nobles), qui ont une affinité prédominante avec les phases fluides, se localisent principalement dans l'atmosphère et l'hydrosphère ;

·         les lithophiles (Si, Al, Na, Fe, Ca, Mg, etc.), à forte affinité avec l'oxygène dans la lithosphère et le manteau supérieur ;

·         les chalcophiles (S, Cu, Zn, Ag), fréquemment associés au soufre dans le manteau inférieur (hypothèse désormais invalidée) ;

·         les sidérophiles (Fe, Ni, Au), préférentiellement associés au fer dans le noyau terrestre.

 

​Cette répartition dans les trois principales couches terrestres correspond à la croûte SIAL (silicium et aluminium), au manteau SIMA (silicium et magnésium) et au noyau NIFE (nickel et fer), modèle des enveloppes proposées par le géologue Eduard Suess en 1909[6] et encore utilisé par les géophysiciens de l'avant-guerre[7].

Les géochimistes actuels ont amendé, affiné et complété cette vision des quatre grandes familles géochimiques dans les principaux réservoirs terrestres, mais cette classification de Goldschmidt reste utile pour appréhender la géodynamique chimique interne globale[8].

Les différentes classifications utilisées en géochimie.

Fondée sur l'électronégativité des éléments.

Elle est basée sur le partitionnement des éléments dans les météorites.

On distingue :

  • Les éléments chalcophiles : affinité avec le soufre,  As, Cu, Zn, Cd, Pb ...

  • Les éléments sidérophiles : affinité avec le fer métallique, Ni, Cr, Co, Pt ...

  • Les éléments lithophiles : affinité avec les silicates, éléments alcalins, alcalino-terreux, Na, K, Ca ....

  • Les éléments atmophiles : les éléments gazeux non combinés, H, N, C et gaz rares.

 

Les éléments sidérophiles sont concentrés dans le noyau terrestre alors que les éléments atmophiles se trouvent principalement dans l'atmosphère terrestre.

 

Notons que certains éléments peuvent appartenir à deux ou trois classes, selon leur charge. Exemple : le fer peut être lithophile, chalcophile et sidérophile.

Fondée sur l'abondance des éléments dans les minéraux et roches

Selon leur abondance en éléments chimiques dans les minéraux et roches.

On distingue :

  • Les éléments majeurs : principaux éléments chimiques qui constituent les roches et minéraux, exprimés en oxydes,SiO2, TiO2, Al2O3, FeO, MgO, MnO, CaO, Na2O, K2O et P2O5. Leur teneur dans les minéraux et roches est supérieure à 1 %.

  • Les éléments mineurs : éléments dont la teneur dans les roches est située entre 0,1 et 1

  • %, TiO2, MnO, K2O et P2O5. Ils sont parfois être majeurs dans certains types de roches ou mineurs dans d'autres. Exemple : K2O est majeur dans les granites et mineurs et même traces dans les basaltes.

  • Les éléments traces : éléments dont la teneur est inférieure à 0,1 %. On les exprime en ppm (partie par million).

ABONDANCE DANS LA CROÛTE TERRESTRE

La classification géochimique des éléments est intimement liée à leur abondance dans la croûte terrestre en comparaison avec leur abondance dans le système solaire :
La croûte terrestre est plus riche en lithophiles comparée au système solaire, car ils forment des oxydes solides peu denses qui se sont concentrés dans les couches superficielles de la Terre pendant l'accrétion initiale de la Terre
Elle est pauvre en éléments sidérophiles et atmophiles, les sidérophiles ayant une densité élevée ont été entraînés jusqu'au noyau avec le fer, et les atmophiles sont trop volatils pour avoir été incorporés dans la masse terrestre durant l'accrétion
Elle est aussi appauvrie en éléments chalcophiles, plus denses que les oxydes formés par les lithophiles.

Abondance relative comparée des éléments
exprimée en log10 normalisée sur le silicium
[4]

Premier tableau classement sur les chiffres comparatifs (2 avant-dernières colonnes).

Abondance relative comparée des éléments 01.jpg

Second tableau classement sur le n° atomique comparatifs (première colonne).

Abondance relative comparée des éléments02.jpg

Classification des éléments traces.

Selon leur position dans le tableau périodique.

Une classification très importante en géochimie, en effet les éléments qui ont des similarités dans leurs caractéristiques chimiques présentent des similarités dans leur comportement géochimique.

On distingue :

  • gaz rares :

    • Ne, Ar, Kr et Xe.

  • lanthanides ou Terres rares (REE, rare earth elements) :

    • les éléments du numéro atomique 57 au numéro 71. La, Ce, Pr, Nd, (Pm), Sm, Eu, Gd, Tb, Dy, Ho, Er, Tm, Yb, Lu.

  • groupe du platine :

    • Ru, Rh, Pd, Os, Ir, et Pt (parfois Au).

  • métaux de transition :

    • éléments 21 à 30, de Sc à Zn.

Selon leur comportement lors de la fusion partielle.

Durant la fusion partielle, certains éléments en traces se concentrent dans la phase liquide et d'autres dans la phase solide.

  • ceux qui se concentrent en phase liquide sont appelés incompatibles. Les degré d'incompatibilité d'un éléments dans une phase minérale est exprimé par le coefficient de partition ou de partage minéral-liquide noté K ou P[7]

 

 

           

 

                       

Cs : concentration de l'élément dans la phase solide.

Cl : concentration de l'élément dans la phase liquide.

  • ceux qui se concentrent en phase solide sont dits : éléments compatibles.

Si K < 1 = incompatible.

Les éléments fortement incompatibles sont des hygromagmaphiles car ils se concentrent dans le magma liquide. On ne les rencontre jamais dans les cristaux pour deux raisons leur charge et leur taille.

 

Les éléments dont Kd > 1 sont compatible. Ils sont facilement incorporés dans le solide. Exemple : le nickel est incorporé dans les minéraux ferro-magnésiens comme l'olivine. On dit qu'il est compatible avec la structure de l'olivine.

K=Cs_Cl.jpg

Selon leur charge et leur rayon ionique.

Lors les transformations géochimiques, les éléments ayant un faible rayon ionique et une forte charge ont un comportement différent des éléments à fort rayon ionique et faible charge.

 

Les éléments à forte charge et à faible rayon ionique sont appelés : HFSE (high field strenght elements) :

En chimie et géochimie, HFSE est le sigle anglais pour désigner les éléments dont les ions ont un petit rayon et une charge élévé (High Field Strength Elements)1. La définition varie suivant les domaines :

  • En chimie, les HFSE regroupent tous les ions trivalents et tétravalents, y compris les terres rares, les platinoïdes, l'uranium et le thorium.

  • En géochimie, les HFSE regroupent : Hf, Zr, Ti, Nb et Ta. Ils permettent de distinguer dans les roches magmatiques celles associées à des plaques convergentes (appauvries en HFSE) des roches associées à des plaques divergentes (enrichies en HFSE).

Ces éléments sont immobiles durant l'altération des roches. Ils sont incompatibles.

Les éléments à fort rayon ionique et à faible charge sont appelés : LILE (large ion lithophile elements).

En pétrologie et géochimie, LILE est l'acronyme anglais pour désigner les éléments lithophiles à grand rayon ionique (Large Ion Lithophile Elements)[9-10].

Ce groupe d'éléments est généralement caractérisé par leur incompatibilité lors de la cristallisation des masses lithosphériques et s'accumulent dans la masse fondue (et s'appauvrissent de fait dans les masses non fondues).

 

Ces éléments sont très mobiles lors de l'altération des roches. Ils sont incompatibles.

 

Les LILE comprennent les éléments suivants avec une charge ionique de +1 et +2[11] :

Valence des éléments.jpg

Les éléments quadrivalents comme le thorium et l'uranium sont parfois classés dans les LILE, bien qu'ils appartiennent aux HFSE.

Les éléments strontium, baryum et europium ne se comportent pas comme des LILE dans les magmas acides mais comme des éléments compatibles et s'accumulent dans les feldspaths cristallisants.

Selon la température de condensation des éléments.

La condensation est le passage de l'état gazeux à l'état solide.

Lorsque l’on considère les premiers évènements manquant de la naissance du système solaire, la condensation des gaz autour les poussières dans la nébuleuse en cours d’effondrement sur le disque d’accrétion du Soleil constitue le phénomène majeur de cette époque. Il n’a rien d’homogène et l’influence du Soleil en train de naître (masse température émission d’un vent très fort) est essentielle. On distingue donc les éléments chimique en fonction de le température de condensation :

  • Réfractaires Tc 1400 K   (T°condensation)>

  • Modérément réfractaires Tc~1300 K

  • Modérément volatils 800 K<1200 K

  • Volatils Tc< 800 K

Cette classification est basée sur la condensation des éléments lors de la formation du Système solaire.

Les éléments réfractaires sont donc ceux qui sont les premiers à se condenser dans une nébuleuse stellaire au cours de son refroidissement. Ces éléments sont stables à l’état gazeux à haute température dans les conditions de basse pression de la nébuleuse.

Le tableau ci-dessous  présente la série de condensation en fonction de la température dans la nébuleuse solaire

Chimie des condensat.jpg

Série de condensation à l’équilibre d’un gaz de composition solaire ; à T° donnée (ou à une distance donnée du centre de la nébuleuse), tout ce qui est au-dessous de la température est solide, tout ce qui est en dessus est gazeux. Tableau ENS Lyon.

Les éléments typiquement réfractaires sont ceux du champ du fer, dont la température de vaporisation est supérieure à 1600°K. Ils furent les premiers à condenser, au voisinage du plan équatorial de la nébuleuse présolaire en cours d’effondrement et à proximité de notre étoile en formation (voir http://www.meteoritestudies.com de David Weir), sans doute moins de 3UA (Unité Astronomique = distance actuelle Terre Soleil). La liste de ces métaux (éléments sidérophiles réfractaires est donnée plus haut. On observe ces condensats dans les CAIs (pour Ca-Al rich Inclusions) sous forme de micro grains au cœur des minéraux les plus précoces, dont ils ont favorisé la nucléation et la croissance.  A température un peu plus basse, mais encore supérieure à 1300-1400°K, s’opéra la condensation des différents oxydes comme le corindon (Al2O3) ou l’hibonite (un oxyde complexe d’Aluminium associé au Titane, au calcium et au magnésium etc.), puis celle des silicates (d’abord mellilite (Ca,Na)2(Al,Mg,Fe2+)[(Al,Si)SiO7]  puis diopside (Ca,Mg)[Si2O6], forstérite Mg2[SiO4] et anorthite Ca[Si2Al2O8], associés à oxydes  tels que la pérovskite CaTiO3 et le spinelle Al2O3,MgO.

On estime que la condensation de ces phases hautement réfractaire n’a pas duré plus de 2.5 Ma, car cela correspond à la période durant laquelle l’isotope radiogénique de l’aluminium 26 Al de période 700 000 ans (voir poly la Terre est ronde et cours sur le géotherme) a pu être incorporé à partir d’une ou plusieurs supernova qui aurait ensemencé notre nuage solaire, puis être fractionné dans des différents minéraux constitutifs des chondrites, tout cela  avant que sa radioactivité soit éteinte et ne laisse des traces dans le rapport des isotopes 26Mg et 25Mg.

Dans la nébuleuse solaire, la température et la densité de gaz décroissent en allant vers la périphérie du nuage ; il s’établit donc un profil de température qui, selon Grossmann et Larimer (1974, fig. 1), a guidé la condensation du gaz de la nébuleuse, en fonction du caractère plus ou moins réfractaire des éléments chimiques.

séquence de condensation dans la nébuleuse proto-solaire.jpg

La séquence de condensation dans la nébuleuse proto-solaire, à P=10-4 Atm,

d’après Grossman et Larimer 1974.

Ce gradient n’a rien de statique. Au début de la naissance du Soleil, au fur et à mesure de la condensation du gaz, des régions encore froides devenaient chaudes. Cette augmentation de température du système s’est arrêté avec l'arrêt de l'effondrement du Soleil, c’est à dire lorsque les réactions nucléaires se sont allumées. Le système a alors commencé à se refroidir.

Au fur et à mesure du refroidissement du système, un point situé à une distance donnée du soleil voit sa température décroître et donc des condensats de plu en plus froid apparaissent en ce point. Celui-ci voit donc en quelque sorte la séquence de condensation progresser dans le temps de la gauche vers la droite. Conformément à ce modèle, les premiers globules de condensation qui aient vu le jour autour du Soleil étaient constitués de Calcium et d’Aluminium. On les retrouve dans les chondrites carbonées les plus anciennes, sous forme d’inclusion appelées CAIs. Ces inclusions sont constituées, outre des silicates de haute température, d’oxydes réfractaires tels que le corindon (Al2O3), de l'hibonite (un oxyde d’Al et Ca) et de la pérovskite (oxyde de Ca et Ti). Leur composition isotopique est très hétérogène et très différente ce celle des roches connues sur Terre ou la Lune. Elle laisse à penser que les éléments qui les constituent proviennent d’explosions d’étoiles différentes ; les nuages de gaz dispersés dans le cosmos par ces explosions seraient alors venus se mêler au nuage protosolaire.   Ces objets (CAIs) ont été fabriqués par condensation si tôt dans le système solaire que celui-ci n’avait pas encore subi d’homogénéisation. Ils conservent ainsi la trace de leur origine.

Avec la série de condensation, on distingue deux régions autour du Soleil :

1 -    Dans le voisinage chaud du soleil, seuls les éléments ou molécules les plus réfractaires peuvent se condenser en poussières solides. Les autres éléments ou molécules y sont bien présents, mais restent à l’état gazeux ; avec la distance au soleil nous rencontrons d’abord le domaine des oxydes réfractaires de Ca, Al, Ti, puis celui des métaux (e.g. Fe et Fe-Ni), puis celui des silicates ferromagnésiens (e.g. olivine –pyroxène), pour voir enfin à T<600°K la molécule OH se condenser avec les silicates (pour former des amphiboles par exemple). Nous sommes dans le champ du fer et des silicates (tableau ENS Lyon);

2 -    Loin du Soleil, en dessous de 175°K, les éléments ou molécules plus volatils se condensent à leur tour, et l’on pénètre dans de monde de la glace d’eau et des hydrates d’ammoniac ou de méthane. Les silicates et le fer sont encore présents, mais se couvrent d'un givre glacé, donnant un mélange fer-silicates-glaces baignant dans un mélange gazeux fait d’Hydrogène et d’Hélium (tableau ENS Lyon).

Notons que la température n'est jamais assez basse pour que l’Hydrogène et l’Hélium se condensent.

Fig 2.jpg

SOURCES 

  1. C'est au cours de ces travaux que Goldschmidt détermina le rayon ionique des lanthanides et découvrit la contraction des lanthanides, c'est-à-dire la diminution sensible du rayon ionique de ces éléments lorsque leur numéro atomique augmente.

  2. Victor Goldschmidt, « The principles of distribution of chemical elements in minerals and rocks », Journal of the Chemical Society,‎ 17 mars 1937, p. 655–673

  3. Université d'Ottawa : Classification géochimique des éléments. Page 13 : « Exceptions et surprises ».

  4. University of Colorado : Mineral Crystal Chemistry. Table 3.1 – « Element Abundances Given in log10 of Numbers of Atoms Per 106 Si Atoms »

  5. Claude Allègre, Gil Michard, Introduction à la géochimie, Presses universitaires de France, 1973, p. 21

  6. Eduard Suess, La Face de la Terre, Armand Colin, 1909, p. 534.

  7. Vincent Deparis, Hilaire Legros, Voyage à l'intérieur de la terre, CNRS Éditions, 2000, p. 391.

  8. Maurice Renard, Yves Lagabrielle, Erwan Martin, Marc de Rafélis Saint Sauveur, Éléments de géologie, Dunod, 2018, p. 110-111.

  9. « Springer.com - Lithophile »

  10. « Springer - LILE »

  11. Shannon, R. D.: Revised effective ionic radii and systematic studies of interatomic distances in halides and chalcogenides. In: Acta Cryst. A.Band 32, 1976, S. 751–767, doi : 10.1107/S0567739476001551.

  12. David Weir http://www.meteoritestudies.com

  13. Magali Sautier EMSE, Mines St Etienne

  14. Dr Chabou Moulley Charaf Université Ferhat Abbas, Sétif

  15. Wikipédia

bottom of page